« Je ne vais pas répondre à cette question. La seule qui se pose, pour moi, c’est de faire gagner Valérie Pécresse. » À l’image de Nadine Morano, interrogée mardi 8 février par Élizabeth Martichoux, certains cadres Les Républicains louvoient lorsqu’il s’agit de se positionner en cas d’un éventuel second tour Macron-Zemmour.

Pris en tenaille entre le président de la République et l’ancien journaliste du Figaro, les membres du parti esquivent le sujet du « cordon sanitaire » prôné par Jacques Chirac vis-à-vis de la droite nationaliste. Sans doute pour ne pas se laisser enfermés dans une issue perdante mais aussi pour ne pas se couper des électeurs les plus droitiers de LR tentés par l’essayiste – ou par Marine Le Pen.

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Mais outre l’aspect stratégique, la ligne et la dynamique Zemmour séduisent aussi quelques élus. D’autant qu’une non-qualification de Pécresse au second tour pourrait bien fracturer irrémédiablement le parti, poussant les plus modérés à partir pour En marche et Horizons, les autres se tournant vers les tenants d’une droite dure potentiellement incarnée par le polémiste. Qui sont ces élus « Zemmour-compatibles » ? Attention, liste non exhaustive.

Ceux qui sont compatibles

Éric Ciotti

Qu’il s’agisse du volet immigration ou économique, Zemmour et Ciotti semblent indifférenciables. L’ex polémiste a d’ailleurs repris la proposition du député des Alpes-Maritimes sur la suppression des droits de successions, un « impôt sur la mort ». Le député niçois est le seul de son camp à avoir exprimé franchement sa préférence pour le polémiste en cas de duel face au président sortant. « Je voterais Éric Zemmour, très clairement », assurait-il en septembre.

Propos réitérés à plusieurs reprises, même en qualité de conseiller politique auprès de Valérie Pécresse. Comme face à Jean-Jacques Bourdin début janvier : « Pourquoi voulez-vous que je change ? […] Je ne me renie pas », répondait-il quand on lui demandait. Il nuançait toutefois son propos, assurant que « seule Valérie Pécresse peut battre Emmanuel Macron ».

Du côté du polémiste, les appels du pied sont constants. Pendant le congrès, Éric Zemmour ne s’était d’ailleurs pas opposé à faire circuler une consigne de vote parmi ses partisans encartés LR… en faveur d’Éric Ciotti.

Nadine Morano

L’eurodéputée ne cache pas ses sympathies pour Éric Zemmour. Sur LCI mardi 8 février, Nadine Morano assumait : « Il reste mon ami, je vous le confirme. Je considère qu’il a une vraie sincérité, je vous le confirme. Qu’il ait eu le courage de mettre des débats sur la table et qu’il ait fait évoluer le débat politique sur certains sujets, je vous le confirme. Après, je l’écoute avec beaucoup d’intérêt, et je considère qu’il a des propositions qui ne sont pas à la hauteur de l’enjeu et qui sont des propositions faciles, voire démagogiques. »

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Elle cite, en exemple la suppression de l’enseignement des langues étrangères au primaire et l’annulation du permis à points : « L’enseignement des langues étrangères, c’est le plus discriminant dans les familles. Va-t-on réserver l’enseignement des langues étrangères aux familles riches ? » Quant au « permis à points, évidemment ça fait plaisir à tout le monde [mais] je pense qu’il faut sans doute réadapter le système afin qu’il soit un peu plus performant ». Des divergences somme toute secondaires.

En décembre 2018, Nadine Morano avait organisé un dîner-débat à Pont-à-Mousson (Meurthe-et-Moselle) autour d’Éric Zemmour et de son ouvrage Destin français, paru trois mois avant. Cinq cents personnes s’y étaient pressées. À L’Est républicain, l’élue LR avait défendu l’initiative en ces termes : « J’ai toujours aimé chez lui sa vision intellectuelle. Il approfondit le sujet, il est en phase avec le peuple. » Assez pour le rejoindre en cas d’échec de Pécresse à la présidentielle ?

Laurent Wauquiez

Peu de chances pour que Laurent Wauquiez rejoigne les rangs de Reconquête !. Même si Zemmour en rêve. En octobre, le polémiste – à l’époque pas encore officiellement candidat à la présidentielle – caressait le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes dans le sens du poil : « Il fait partie de ceux qui ont le plus de surface politique, de profondeur et de conviction. [Zemmour et Wauquiez] sont d’ailleurs très liés, et sont sur le même créneau. Ce qui les réunit, c’est d’avoir saisi la base de la droite LR, qui demande aujourd’hui de la radicalité », développait un zemmouriste auprès de L’Express.

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On se souvient de l’accueil chaleureux réservé en 2019 à l’ancien journaliste au siège Les Républicains par Laurent Wauquiez, alors président du parti. « Vous êtes ici chez vous ! Éric est ici chez lui ! », clamait-il devant 500 personnes venues écouter le polémiste à l’occasion de la sortie de son ouvrage Destin français. L’occasion aussi, pour les deux protagonistes, de discourir face caméra d’Histoire avec un grand « H ».

Dans Le Radicalisé, le journaliste Étienne Girard relatait la proximité idéologique entre les deux hommes. À l’été 2021, Éric Zemmour aurait même conditionné son entrée dans la course à l’absence de Laurent Wauquiez : « Si Laurent y va, je n’y vais pas. » De son côté, l’ancien patron des LR a toujours tenté d’aspirer l’électorat convoité par la « droite hors les murs ». Sur ses propres terres, notamment, où Augustin Neyrand, ancien directeur de campagne adjoint du sénateur Étienne Blanc (proche de Laurent Wauquiez) œuvre à présent pour Éric Zemmour.

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« Wauquiez a mis fin à ce vieux clivage, assurait à L’Express un membre de l’entourage de Marion Maréchal. Au niveau du conseil régional, tous les marionistes qui ont quitté le RN suite à la purge lui parlent. » Alors que la nièce de Marine Le Pen s’apprêterait à rejoindre Éric Zemmour, Wauquiez pourrait-il voir en l’Union des droites une occasion de ne pas disparaître du champ politique en cas de délitement des Républicains ?

Ceux qui pourraient partir dès à présent

Sébastien Meurant

Sébastien Meurant, vice-président d’Osez la France, l’a exprimé très clairement à L’Incorrect en septembre : « Je pourrais soutenir Éric Zemmour. » Le sénateur du Val-d’Oise y annonçait que « le Grand remplacement est en marche ». Son soutien à Valérie Pécresse s’est fait dans la douleur : « S’il n’y avait pas tous ces nouveaux arrivants ces dernières semaines, le candidat LR, c’est Éric Ciotti », se lamentait-il auprès de LCP. Énigmatique, il restait flou quant à ses intentions à venir dans la campagne : « Vous verrez bien. Ce sera l’occasion de se revoir », déclarait-il début décembre. Depuis, les responsables LR ont réussi à le retenir dans leurs rangs. Pour combien de temps encore ?

Étienne Blanc

Comme écrit plus haut, son ancien directeur adjoint a déjà rejoint l’ex-journaliste. Et lui-même semble tenté par l’aventure. Le sénateur du Rhône Étienne Blanc, proche de Laurent Wauquiez, était cité dans l’édition du 19 janvier par Le Canard enchaîné parmi « les sénateurs pas loin de basculer chez Zemmour ». S’il a démenti cette intention, il reconnaît toutefois dans les colonnes du Progrès que « la droite doit prendre à bras-le-corps certaines idées, la souveraineté, la nationalité, le déclin, l’immigration, l’identité, la langue, autant de thèmes dont Zemmour fait son fonds de commerce ».

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« Il y a un mouvement très profond chez LR de gens qui ne voient pas de différences sensibles entre Valérie Pécresse et le président de la République, avertissait le sénateur dans Le Parisien à la suite du ralliement de Guillaume Peltier au polémiste. La question est clairement posée : est-ce que ça n’est pas chez Zemmour que nos convictions sont le mieux défendues. »

Gilles Platret

Nous le relations mi-janvier. Le maire de Chalon-sur-Saône, par ailleurs vice-président de LR, suscite quelques interrogations au sein du parti. « Un fantôme. » C’est ainsi qu’un pilier de la campagne de Valérie Pécresse décrivait Gilles Platret. Totalement absent des radars, le maire de Chalon-sur-Saône – coutumier des prises de position très droitières – inquiétait certaines huiles du parti Les Républicains (LR).

Pour ne rien arranger, les rapports entre Platret et la référente locale LR pour la campagne présidentielle, Marie-Claude Jarrot, sont glaciaux. « Ils ne peuvent pas se voir en peinture », grinçait un proche de Pécresse. Un autre membre de l’équipe s’interrogeait : « Peut-être qu’il fait monter la sauce pour obtenir quelque chose. C’est une grande gueule sympathique, mais qui a un souci de carrière, ce qui le pousse à aller au bras de fer. Pour Zemmour, il serait plus important que Peltier. Peltier, c’est de la fausse monnaie. Platret, c’est un vrai mec de réseaux. »

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